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Yzabel-Desage-critiques-et-points-de-vue-de-lectures.over-blog.com

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Ce blog a pour but de partager mes critiques, avis et points de vue de lectures : romans contemporains et classiques, autobiographies et faits divers, théâtre, poésie, essais psychanalytiques, sociologiques, éducatifs, romans graphiques et BD, littérature jeunesse.


Les Simples de Yannick Grannec, 2019

Publié par Isabelle Desage sur 29 Mars 2020, 09:46am

Catégories : #Littérature, #Roman contemporain, #roman historique

Les Simples de Yannick Grannec, 2019

 

Les Simples, Yannick Grannec, 2019

 

Le titre fait référence aux herbes médicinales dont le ramassage, la conservation et l’usage demandent une longue expérience. Ces herbes ont souvent un double effet qui conduit à un soulagement ou une guérison mais aussi à la mort si elles sont mal employées. Mais Les Simples, relate aussi l'histoire d'une petite communauté de bénédictines vivant recluses dans l'abbaye de Notre-Dame du Loup, en Provence. Et si tout paraît « simple », au premier abord, le lecteur comprend rapidement qu’il n’en est rien et qu’à l’instar des plantes nous voyons apparaître les multiples côtés des humains, bon et mauvais, de la politique et de la religion alliées pour le pire. Nous voyons aussi diverses facettes de la réclusion qui, si elle fortifie l’amour de Dieu, conduit aussi à la pure démence et à la démesure du pouvoir humain qui se transforme en tyrannie et en crime. Enfin, nous assistons à la liesse populaire, gorgée de fausses croyances, de bêtise, d’abrutissement religieux, prête à retrouver, instantanément, son instinct criminel.

Ce roman polyphonique est présenté sous forme de chapitre donnant voix à chaque personnage et offrant ainsi différents points de vue sur cette histoire qui se situe en 1584, rythmée par les saisons : « Vingtième jour d’avril / A Saint-Théodore fleurit le bouton d’or ». Chaque chapitre s’ouvre sur une recette médicinale, recettes soigneusement consignées et illustrées tout au long du récit par la sœur Clémence et Gabrielle, protagonistes de l’histoire. Certaines potions, utilisées dans l’hôpital tenu par les sœurs, sont aussi vendues par delà le royaume. Les sœurs subsistent aussi grâce aux produits de leurs terres constituant la dot de certaines moniales. Mais ce domaine et ses richesses attisent la jalousie du nouvel évêque de Vence qui convoite le pouvoir et le patrimoine des moniales afin d’asseoir son propre pouvoir religieux sur la région.

Autant dire que la quiétude des lieux et la relative indépendance des moniales vont être mises à mal car la situation va vite dégénérer. En effet, il question de femmes qui guérissent - donc de sorcières - et comme le dira, l’un des personnages « la porte est ouverte pour faire entrer le diable ». Un odieux complot va s’ourdir à l’encontre des sœurs.

Ce roman évoque la condition féminine à cette époque en montrant que la liberté des femmes passait davantage par l’enfermement que par le mariage. Les femmes « données » à un époux par un père tout puissant n’avait qu’à obéir ou mourir. Certaines, choisissent le voile afin de recevoir l’instruction qu’elle n’aurait jamais eue en dehors des murs. De même, ces murs protègent de la violence des hommes, des épidémies, de la mort en couche. Ce roman met aussi au jour la question de la médecine et de l’hygiène, quasi inexistante à cette époque. Médecine et croyances populaires sont mêlées, les superstitions et la religion font bon ménage et il ne fait bon susciter la convoitise ou la colère des voisins, du seigneur, du prêtre. Tout est bon pour éliminer brutalement celui ou celle qui dérange, par la chasse à l’homme, le feu, la torture.

Ce roman finement documenté (l’auteur énonce ses sources à la fin de l’oeuvre) est presque didactique. En effet, le lecteur enrichit ses connaissances sur les plantes mais aussi la vie de l’abbaye à travers les heures et la dénomination des prières, des différents grades religieux. J’émets une réserve quant au désir trop prégnant de l’auteur de tenter d’imiter une certaine langue populaire qui recourt à l’argot des faubourgs (« la daronne ») ou à l’usage d’expressions incorrectes ou grossières, très contemporaines : « tu m’étonnes » ; « au final » ; « une vie de merde ». Tout ceci allié à l’usage répétitif d’archaïsmes expose de façon ostentatoire le désir de rédiger un roman historique, au plus près d’une certaine vérité mais qui peut devenir lassant, voire étouffant (à l’image peut-être de la vie des nonnes ?) car le lecteur lit d’abord un roman, non un essai (même si, en ce qui me concerne, je lis rarement de littérature purement distractive). Et puis, n’y a t-il pas, de la part de l’auteur, un désir de vouloir absolument être « originale » ? Mais chaque auteur, chaque artiste n’est-il pourtant pas unique à partir du moment où il ne recopie pas ? Et si l’originalité passait par la simplicité (et non le simplisme ?).

 

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