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Yzabel-Desage-critiques-et-points-de-vue-de-lectures.over-blog.com

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Ce blog a pour but de partager mes critiques, avis et points de vue de lectures : romans contemporains et classiques, autobiographies et faits divers, théâtre, poésie, essais psychanalytiques, sociologiques, éducatifs, romans graphiques et BD, littérature jeunesse.


3 nanas, Saint-Phalle, Bourgeois, Messager, Nathalie Piégay, Edit. Seuil, col. "Fiction & Cie", 2023

Publié par Isabelle Desage sur 24 Octobre 2023, 14:10pm

Catégories : #Littérature, #Roman contemporain, #autobiographie, #essai, #babelio, #arts, #femmes, #litteraturecontemporaine, #peinture, #arts plastiques, #Éditions du Seuil, #Nathalie piégay, #La suisse, #Malakoff

3 nanas, Saint-Phalle, Bourgeois, Messager, Nathalie Piégay, Edit. Seuil, col. "Fiction & Cie", 2023

3 nanas, Saint-Phalle, Bourgeois, Messager, Nathalie Piégay, Seuil, 2023

Installée en Suisse pour son travail, Nathalie Piégay va s’intéresser à Niki de Saint-Phalle dont l’oeuvre et le récit de vie la mèneront à la rencontre de Louise Bourgeois puis, d’Annette Messager. Souvent classé comme « essai », ce livre est placé chez les libraires dans le rayon des romans, des arts, ou celui attribué au « féminisme ». Cette inclassabilité montre toute la richesse de ce récit qui relate des faits réels mais qui est aussi fiction, autobiographie et pourquoi pas, récit de voyages. Ainsi, Nathalie Piégay, à travers la vie de trois artistes et la sienne propre, offre une vision de la géniale arborescence humaine entrecroisant ou plutôt, tissant les fils de la vie, de la création, de la pensée vers ce qui constitue la condition humaine avec ses contradictions, sa variété, ses failles, ses désirs, ses secrets.

Trois personnages, trois temps, trois histoires : voila ce que nous propose Nathalie Piégay qui a longuement enquêté sur ces artistes contemporaines. Au fur et à mesure de ses recherches, de ses nombreux déplacements, l’auteure va dénicher les secrets de chacune de ces héroïnes de l’art jusqu’à comprendre le lien qui les unit tout en livrant aux lecteurs, ses propres souvenirs. Nous constatons aussi que la création a une valeur curative. Pour ces femmes, le geste, la symbolique (l’acte de « tuer le père » ou « Maman ») aide à exorciser ses démons et à tenir debout, malgré tout.

Le destin est prépondérant dans ce récit puisque c’est en acceptant de se laisser guider par certains signes et rencontres que l’auteur va entrevoir l’éclaircissement des chemins du labyrinthe et accéder à des révélations essentielles : « Je suis descendue du TGV. Je pensais rentrer à Paris délivrée de la vie des autres, la tête libre à présent puisque j’en avais fini avec l’histoire de Louise et celle de Niki, dont je commençais à admettre leur folie et leur liberté qui m’avaient fascinée, et j’ai compris que j’étais déjà en train de courir après celle d’Annette Messager. Ou peut-être après la mienne. […] La folie qu’elles avaient dû affronter et sans laquelle elles n’auraient pas crée des œuvres aussi cruelles et puissantes avaient réveillé les obsessions qui m’occupaient depuis longtemps. ». Mais le destin c'est aussi l'image de ces trois femmes tissant à l'image des Trois Parques, le titre de leurs œuvres comme « Le Jardin des tarots ». Les matières symbolique comme le fils, la laine et le geste inhérent au tissage et à la couture donnent naissance à une vie artistique qu'elles peuvent détruire selon leur bon vouloir.

Ainsi, un peu comme une psychanalyste, dans un travail en duo avec les patients, l’auteur va écouter les artistes et tisser des liens avec elles, entre-elles (lectures, interviews, correspondance, expositions, lieux d’habitation, demande d’entretien avec Annette Messager) : « Elle est metteuse en scène, l’actrice et le personnage principal du drame. Et aussi l’interprète majeure. Pas question qu’un autre qu’elle se risque à donner le sens de ses œuvres : elle s’en charge. Pendant des heures je visionne sur mon ordinateur les films tournés à West 20th Street à Chelsea, et Louise, sa voix, ses gestes me deviennent familiers, j’ai l’impression d’être entrée dans sa maison et d’un peu la connaître. Son histoire, c’est elle qui la raconte, et la première personne qu’elle fait entrer en scène c’est son père ».

Enfin, tel un journal de bord, le récit est structuré en chapitre dont la spatio-temporalité est toujours précisée par des lieux, des situations, des dates. Aussi, l’auteur évoque-t-elle au présent ses multiples déplacements à travers un temps et des espaces qui finissent par s’entremêler à ceux des trois femmes et à leur univers familiers, à travers différentes époques apportant une touche mélancolique face à l’inexorable fuite du temps. Nathalie Piégay tisse, elle aussi, au fil de sa plume et de ses récits à la première personne l’histoire de femmes et leur conditions sociales, la famille, la création, la difficulté d’être reconnue, considérée. Ainsi, elle permet à ses personnages réels de vivre éternellement, à condition bien sûr, que les oeuvres soient lues. Tout au long de ses observations, elle permet la révélation des secrets, des hontes, de la douleur, des joies aussi, la résurgence des souvenirs enfouis, de la vieillesse et du temps qui passe. Son écriture tisse des images et des sensations dans lesquelles le lecteur trouve une place active.

 

 

 

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D
J’ai beaucoup aimé ce triple récit, surtout la dernière partie, celle qui est consacrée à Annette Messager, où l’auteure, empêchée d’adopter un point de vue narratif omniscient, fait part de ses errements et laisse finalement sans réponse la plupart des questions qu’elle est amenée à se poser. L’épisode où elle se rend à Malakoff pour tenter de rencontrer Annette Messager dans son atelier m’a fait penser à un passage de « Malakoff » de Grégory Buchert, qui avait essayé quant à lui d’approcher l’artiste Sam Szafran, avec à peine plus de succès que Nathalie Piégay.<br /> J’affecte de mésestimer le « point de vue narratif omniscient », mais à vrai dire je ne me plains pas d’avoir beaucoup appris en lisant « 3 nanas ».
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