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Yzabel-Desage-critiques-et-points-de-vue-de-lectures.over-blog.com

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Ce blog a pour but de partager mes critiques, avis et points de vue de lectures : romans contemporains et classiques, autobiographies et faits divers, théâtre, poésie, essais psychanalytiques, sociologiques, éducatifs, romans graphiques et BD, littérature jeunesse.


Villa Amalia, Pascal Quignard, 2006

Publié par Isabelle Desage sur 15 Novembre 2023, 11:47am

Catégories : #Pascal Quignard, #Roman français, #psychanalyse, #Roman contemporain, #Quête de soi, #musique, #nature, #Italie, #Naples, #Suisse

Villa Amalia, Pascal Quignard, 2006

Il y a des livres qui nous attendent parce qu’ils font écho à notre moi le plus profond, à nos peurs ancestrales, à nos besoins ou aux désirs dont l’enfouissement volontaires permettent de survivre dans la comédie de la vie quotidienne rythmée par le bruit, le masque social, les violences de notre monde. Villa Amalia est un de ces livres qui m’a saisie dès les premières pages faisant écho à mon émotivité souvent handicapante et mon besoin vital de solitude, de beautés diverses, de joies infimes du quotidien. Comme dans un précédent récit, Tous les matins du monde, l’auteur dépeint les espaces et les personnages par petites touches presque picturales et sonores (car souvent poétiques) comme celles d’un pinceau sur une toile ou le pincement d’une corde. Les personnages de ce récit traversent tous des moments de vie difficiles inhérents à la séparation, la maladie, la vieillesse, le deuil mais ils sont beaux et touchant dans leur pudeur, s’interrogeant sur leurs relations aux autres et au monde. Au moment où sa vie s’apprête à basculer, le personnage principal, Ann, musicienne et compositrice, retrouve un ancien camarade d’école, Georges, qui saura être une sorte de complice voire, de passeur l’aidant dans son changement radical de vie qui la révélera à elle-même. Oeuvre du temps qui passe et de la fluctuation permanente de la vie, la tonalité mélancolique qui s’en dégage accompagne une profonde réflexion sur la matérialité de notre existence humaine, sur nos besoins réels enfin, sur le droit que nous avons et que nous nous accordons à suivre notre chemin : « Nous observons assis dans nos fauteuils, étendus dans nos baignoires, couchés dans nos lits, des êtres engourdis ou absents pour lesquels nous n’avons plus d’existence. / Ce n’est pas eux que nous trahissons en les abandonnant. / Leur inertie ou leurs plaintes nous ont abandonnés avant que nous songions à nous séparer d’eux. / La nuit quitta le lac de Côme. / Elle traversa sa troisième frontière sans qu’elle connût de difficultés. […] Elle se dit : « Je ne sais pas où je vais mais j’y cours avec détermination. Quelque chose me manque où je sens que je vais aimer m’égarer ».

Ce récit est aussi une ode à la nature qui accompagne la quête de soi car, dans ce roman, elle n’est jamais hostile à l’Homme mais elle est présente comme un tableau encadrant l’humeur de l’héroïne ou un décor bienfaisant : « La pluie très fine tombait toujours, sans rompre le fil de brume sur la rivière. / Le vieux pont de Teilly semblait flotter hors du monde, au-dessus de la brume pluvieuse. » ; « Une ligne de lumière soudain se mit à luire à l’autre bout de la baie. Le soleil se levait sur Sorrente. Le début du jour fut sublime. ». L’auteur nous montre sans cesse les contradictions intrinsèques de la nature humaine et le prisme de ses sentiments souvent kaléidoscopiques. Villa Amalia est un livre et le lieu d’une renaissance, celui d’Ann qui aura écouté un besoin impérieux l’amenant à se désencombrer d’une vision illusoire de la vie pour toucher c’est qu’elle appelle, « la peur souche », la peur qui nous habite tous, notre vérité et notre désir profond. Ce magnifique récit m’a renvoyée à celui de Pierre Rey, Une Saison chez Lacan, œuvre autobiographique qui dépeint la quête de soi et la paix enfin trouvée, le dépouillement de toute matérialité inutile et la liberté de prendre le temps de rêver, lire, écrire, penser, se cultiver, créer, partager, aller vers ce pour quoi l’être humain est sur terre : évoluer (à ce sujet, je ferai mention du très beau livre du sociologue Gérald Bronner, Apocalypse cognitive) qui lui aussi développe une réflexion humaniste sur la possibilité d’évolution de l’être humain vers un avenir meilleur.

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